Obligation d’emploi des travailleurs handicapés : les aides possibles à destination des entreprises

« Trente ans après la loi de 1987, malgré de nets progrès, l’objectif des 6 % de travailleurs en situation de handicap n’est pas atteint. Les personnes handicapées continuent de rencontrer de fortes difficultés pour accéder à l’emploi et s’y maintenir. Le taux d’emploi direct dans le secteur privé est de 3,5 % seulement et il ne progresse que de 0,1 % par an. Une personne handicapée a aujourd’hui trois fois moins de chances que la moyenne d’être en emploi et elle est deux fois plus exposée au chômage, avec, de surcroît, des périodes d’inactivité plus longues. » indiquait Sophie Cluzel, Secrétaire d’État chargée des personnes handicapées en juin 2019.

Depuis cette date, différentes aides, dispositifs ont été mis en place. À l’occasion de la « Journée internationale des personnes handicapées », célébrée le 3 décembre, passons en revue les aides accordées aux entreprises et l’impact sur l’emploi des personnes en situation de handicap.

La loi du 10 juillet 1987

Elle oblige les entreprises d’au moins 20 salariés à employer des travailleurs handicapés, dans une proportion de 6 % de leurs effectifs. Une obligation dont elles peuvent s’acquitter de plusieurs façons : recrutements directs, contrats de sous-traitance, accueil de personnes handicapées en stage au titre de la formation professionnelle, ou bien accords d’entreprise, de groupe ou de branche. À défaut, elles sont tenues de verser une compensation financière à l’Agefiph.

Obligation d'emploi des travailleurs handicapés

Il est à noter que depuis le 1er janvier 2020 tous les employeurs, y compris ceux occupant moins de 20 salariés, doivent déclarer le nombre de travailleurs handicapés qu’ils emploient, même si ces derniers ne sont pas tenus par l’obligation de 6%.

L’accès à l’emploi des travailleurs handicapés est également favorisé par la loi du 11 février 2005 qui pose le principe de non-discrimination et prévoit un certain nombre de mesures et d’aides à l’emploi afin de compenser les surcoûts éventuels liés à l’embauche d’un travailleur en situation de handicap. Il existe un accès à l’emploi pour chaque travailleur handicapé en fonction de ses aptitudes et de ses ambitions.

L’AGEFIPH

L’AGEFIPH (Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées) a pour mission de favoriser l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi de personnes handicapées dans les entreprises privées et en milieu ordinaire de travail.

Au service de cette mission, l’AGEFIPH :

  • Collecte et gère les contributions des entreprises privées soumises à l’obligation d’emploi de 6%.
  • Noue et anime des partenariats avec les acteurs publics nationaux et locaux (Conseils régionaux, Pôle emploi…) destinés à amplifier les politiques publiques en faveur des personnes handicapées.
  • Propose une offre d’interventions composée de conseils, d’accompagnement et d’aides financières destinés aux personnes handicapées et aux entreprises.

Il est à noter que face à l’inflation actuelle, l’Agefiph a décidé d’augmenter plusieurs de ses aides depuis le 1er septembre 2022.

Afin de compenser les surcoûts éventuels liés à l’embauche d’un travailleur en situation de handicap, plusieurs aides financières gérées par cet organisme existent.

Le fonctionnement des aides

L’employeur d’une personne concernée par l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH), ou dont la demande est en cours, en CDI ou en CDD de six mois minimum, a d’abord la possibilité de bénéficier d’une aide financière à l’accueil, à l’intégration et à l’évolution professionnelle du salarié.

Forfaitaire, cette aide sert par exemple à financer un programme de sensibilisation des salariés au handicap de leur nouveau collègue, l’accompagnement du manageur à la prise en compte de ses difficultés ou encore un tuteur pour l’aider dans sa prise de fonctions. Depuis le 1er septembre, son montant est passé de 3 000 à 3 150 euros.

Cette aide est prescrite par Pôle emploi, Cap emploi, une Mission locale, ou l’Agefiph, après examen du dossier. Elle peut être mobilisée en amont du recrutement ou dans les neuf mois qui suivent la prise de poste. Afin de bénéficier de ce dispositif, l’employeur doit définir un « plan d’actions » précisant les mesures mises en place : cela suppose qu’il ait déjà identifié la personne à recruter avant de déposer son dossier de demande d’aide. Il a tout intérêt à se rapprocher de l’Agefiph en amont du recrutement.

Versée de manière ponctuelle, cette aide est renouvelable une fois, éventuellement plus en cas de besoins qui apparaîtraient en cours de contrat. Le temps de travail hebdomadaire de la personne recrutée doit être d’au minimum vingt-quatre heures (seize heures en cas de dérogation légale ou conventionnelle).

Pour le financement d’équipements spécifiques, l’employeur a aussi la possibilité de mobiliser l’aide à l’adaptation des situations de travail. Ce dispositif sert à couvrir en partie les frais ponctuels liés à l’aménagement de l’environnement de travail : logiciels spécifiques, masques de protection inclusifs, recours à un auxiliaire pour aider la personne dans la réalisation de ses tâches…

Cette aide est également accordée a posteriori : son montant est défini après analyse du dossier. L’employeur doit notamment faire parvenir un exposé du projet et l’avis du médecin du travail, ainsi que les devis des aménagements établis par les fournisseurs. Cette aide peut être renouvelée en fonction de l’évolution de la situation de travail du salarié.

La difficulté d’évaluer la « lourdeur du handicap »

La principale aide financière reste liée à la reconnaissance de la lourdeur du handicap (RLH) du salarié. Relativement complexe à calculer, malgré une simplification de la procédure opérée en juillet 2016, cette aide vise à compenser les surcoûts récurrents et ceux liés à la moindre productivité de la personne recrutée. Elle est également ouverte aux travailleurs non-salariés.

Pour en bénéficier, l’employeur ou le travailleur non salarié doit constituer une demande auprès de l’Agefiph, en chiffrant les surcoûts récurrents liés à son embauche (abonnement à des logiciels, recours à un auxiliaire, détail des tâches réalisées et du temps passé dessus…) et en joignant à sa demande un avis médical rempli par le médecin du travail. L’employeur peut solliciter cette aide seulement après avoir recruté le salarié et procédé à tous les aménagements nécessaires de son poste.

Cette aide peut toutefois être perçue en amont dans le cas d’une personne reconnue invalide ou ayant un taux d’incapacité permanente supérieur ou égal à 80 %. Elle est accordée pour une durée de trois ans, renouvelable. Le montant de cette aide est basé sur un forfait annuel : pour un temps plein, l’employeur touche 6 088 euros pour une décision à taux normal (faible handicap) et 12 121 euros à taux majoré (lourd handicap). Cette somme est versée par tranches chaque trimestre. Ce dispositif est ouvert à tout type de contrat, mais la complexité de la démarche rend très complexe sa mise en place pour des CDD de courte durée.

Aide à l’embauche en alternance

L’employeur peut enfin bénéficier d’une aide à l’embauche en alternance, dans le cadre d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation d’une durée d’au moins six mois et vingt-quatre heures par semaine (seize heures en cas de dérogation légale ou conventionnelle). Ces aides sont proratisées en fonction du nombre de mois : par exemple, pour un contrat d’apprentissage de six mois, l’entreprise touche 1 000 euros ; pour un contrat de professionnalisation de la même durée, elle touchera 1 500 euros. L’employeur peut bénéficier de 4 000 euros maximum pour un contrat d’apprentissage et 5 000 euros pour un contrat de professionnalisation.

En conclusion

Le rapport Gillot de 2018 soulignait le manque de lisibilité de ces dispositifs, ainsi que la longueur des délais d’instruction pour la reconnaissance administrative du statut de travailleur handicapé. La problématique reste présente. Le taux d’emploi direct des travailleurs handicapés est resté stable en 2021, atteignant 3,5 %, encore loin du niveau minimal de 6 % requis par la loi, d’après une étude de la Dares, service statistique du ministère du Travail publiée le 3 novembre 2022. Néanmoins, nous pouvons constater que le taux de chômage des travailleurs handicapés atteignait 14 % à la fin décembre 2021, contre 18 % en 2018.

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